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Sophie Sesmat,
spécialiste en arts
et traditions populaires
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Cire de deuil ou argizaiola

Croyances et coutumes
Enterrement au Pays-Basque
Voici un bien joli objet lié au culte des morts. Eh oui, même en France, les morts avaient droit à quelques "privilèges".
Sans être macabres, nos ancêtres avaient bien compris que la mort fait partie intégrante de la vie. Notre société contemporaine a effacé la notion de mort, par peur et par pudeur, la rendant invisible et inexistante, sauf en temps de guerre. Elle tente d'ailleur par tous les moyens de la prolonger. Accepter la mort ce n'est pas être résigné, c'est lâcher prise devant l'inévitable. Voilà en quelques mots l'état d'esprit de nos aîeux.
Les cires de deuil furent employées dans le Sud de la France et plus précisément dans les Pyrénées et le Pays Basque. C'est une coutume qui déborde aussi en Espagne, car de nombreuses cires sont catalanes.
Autrefois, afin de matérialiser l'âme du défunt, les membres de la famille proche faisaient brûler un mince cordon de cire. Allumée régulièrement durant un an, cette cire rituelle symbolisait la présence du défunt dans sa propre famille, en société, comme à l'église et au sein de son foyer.
Elles portent le nom de « tracine » à Bagnères, de « trassin » à Mauvezin, de « stère » dans la vallée de Luz, de « candela dera gleysa » vers Lourdes, de « candelou » dans les Landes, de « trens ou traci » vers Tarbes ou encore de « candele de plec » dans la vallée de l’Ossau.  Plus largement, la cire de deuil était nommée « candélou » et tout le monde comprenait de quel objet il s’agissait.
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La confection de ces longs cordons de cire était confiée aux les hommes.
Le cordon est généralement composé de 7 brins de lin cultivé localement. Parfois, il s’agit d’une mèche en coton.
Les cires de deuil étaient fabriquées à la fin du mois de janvier. Le candélou était généralement béni à la Chandeleur, soit juste après avoir été fabriqué. Le fabriquant les déposait sur la balustrade de la communion et le prêtre les bénissait avec la même bénédiction que celle des cierges.
Il est un élément important à souligner : la cire qui constitue la cire de deuil ne peut être achetée.
Elle doit être donnée car la cire à usage religieux ne peut être vendue. Elle pouvait éventuellement avoir été échangée contre du grain. Cette cire devait être très pure et très propre.
Ces cires servaient lors des enterrements, chaque famille en avait une réserve. C’est la première voisine du mort qui allait la chercher, la plaçait sur une chaise vide, l’allumait, la déroulait, la portait au cimetière ou elle le déposait à côté de la tombe lors de l’inhumation.
Tous les autres « perdants » de l’année (ceux qui avaient perdu un proche) en possédaient une.
Dans certains villages, on les plaçait toutes ensemble autour du cercueil.
Le port du candélou était réservé aux femmes, qui durant la messe occupaient la nef alors que les hommes étaient dans la tribune. Les membres de la famille qui ne pouvaient pas assister à la messe d’enterrement devaient faire parvenir leur candélou : celui-ci les représentait.
Après l’enterrement, les perdantes portaient leur cire à l’église, pour chaque office, durant un ou deux ans. Parfois des amies venaient avec les leurs, pour les soutenir. Au moment de l’anniversaire du décès, la cire était disposée devant la perdante, sur une serviette blanche.
A la Toussaint, les enfants de chœur allaient distribuer à tous les foyers un petit morceau de candelou, qu’ils allaient fixer sur la tombe de leurs défunts et l’allumait. 
Il existe différentes formes de cires de deuil : 
-en cube type pavé 
-en rectangle
-en rouleau 
-en couronne
-en gerbe
-en tresse
-en bobine
-en cône
-en cerceau
-certaines étaient enroulées autour d’une planchette, d’abord dans un sens, puis dans un autre.
-dans le Pays Basque, le candelou pouvait avoir une taille importante et était souvent admiré pour sa grande beauté, il s’agissait presque d’une œuvre d’art, tellement la cire était travaillée. On l’appelle alors « lourquet ». Le lourquet se fixait à la croix processionnelle et était offerte au curé qui s'en servait pour allumer les bougies de l'église. Sa fabrication pouvait nécessiter jusqu’à 60 mètres de cire filée.
Certaines de ces cires étaient disposées dans une corbeille finement tressée.
Parfois, on peut remarquer une très belle planchette de bois sculptée, sur laquelle était entouré qui permettait de faire brûler le cordon de cire est appelée « parilla ».
Cette coutume funéraire a perduré dans certaines régions pyrénéennes jusqu’aux années 1950.On vendait encore des candélous  sur le marché de Rabastens en 1956. 
L’usage de la cire filée à l’occasion de la mort et des funérailles semble remonter au Moyen Age et est présente dans une bonne partie de l’Europe.
En France, on trouve aussi des cires de deuil à Ouessant et en Alsace. 
En Bretagne, la cire de deuil est appelée « croix de Proëlla ». Elle remplace le marin disparu en mer.
En Alsace, le Wachosstock est composé de deux couronnes de cires colorées entourant un crucifix sont posées sur la poitrine du défunt pendant la veillée.
Les cires de deuil étaient également utilisées en temps d’épidémie ou de guerre pour protéger la ville. On l’allumait aussi lorsqu’une femme enceinte commençait son travail.
Les cires servaient aussi à se protéger des évènements climatiques.
Certaines vieilles sorcières lisaient dans les gouttes de cire et guérissait les zonas avec la cire des candelous.
Le musée pyrénéen de Lourdes possède une collection importante de cires de deuil, dont malheureusement, la grande majorité se trouve dans les réserves.
Source : 
http://www.musees-midi-pyrenees.fr/encyclopedie/themes/traditions-ethnographie/les-cires-de-deuil/

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