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Sophie Sesmat,
spécialiste en arts
et traditions populaires
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Croix de Rouen

Bijoux régionaux
Croix de Rouen
Comme son nom l’indique, la "croix de Rouen" est un bijou typiquement normand.
 
On l’appelle aussi « croix à pierres », car elle est ornée de petites pierres ornementales, à l’imitation des diamants, qui sont de petits strass.
C’est un bijou régional dont la forme évoque un bijou ancien mais les origines ne sont pas si lointaines qu’il n’y parait.
Cette belle croix voit le jour après la Révolution Française. D’ailleurs, de très nombreux bijoux normands collectés et aujourd’hui exposés dans nos musées datent de la fin du XVIIIème siècle ou du début du XIXème siècle.
 
La croix est portée avec un coulant : il s’agit d’un petit pendentif indépendant de la croix. Il reprend les mêmes décors que la croix puisqu’il y est assorti. Il permettait de régler la longueur du ruban de soie, en portant le bijou soit bas sur la poitrine ou plus près du cou.
Une croix est donc complète lorsqu’elle est accompagnée de son coulant.
 
Il faut souligner un aspect social non négligeable pour ce bijou : il appartient aujourd’hui à l’Art Populaire de part sa production exclusivement locale et son port sur le costume traditionnel normand. Mais jamais une telle croix n’a été réservée à la classe vraiment populaire de Normandie. Elle était portée par des bourgeoises aisées, comme des commerçantes, des épouses de notaires ou d’avocats par exemple. 
Il existe une grande variété dans les décors et dans les formes uniquement pour cette croix.
 
Cela explique l’engouement pour ce bijou ainsi que le nombre important d’orfèvres et de bijoutiers en Normandie (Rouen, le Havre, Saint Lô, …).
Travail d’une extrême patience, la croix de Rouen est un chef d’œuvre technique, à tel point qu’elle est aujourd’hui très difficile à copier. 
Elle est totalement ajourée, telle de la dentelle. Ce décor est rendu possible grâce à la technique du « repercé ».
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Voici comment se réalisait un tel bijou :
 
Avec un poncif (papier genre calque sur lequel le décor initial est tracé) le décor est transféré sur une fine plaque d’or. Grâce à une drille, l’orfèvre évidait toutes les parties hors du tracé. Les décors évidés laissent apparaître des feuillages, des arabesques, des cœurs, des fleurs stylisées et simplifiées à l’extrême, le tout étant majoritairement composé de lignes et de points.
La croix et son coulant sont légèrement bombés, ce qui leur confère un aspect plus aérien et met en valeur la dentelle d’or ainsi réalisée.
 
Le strass est un élément déterminant dans la constitution du le bijou normand, qui comporte donc rarement de véritables diamants.
De ce fait, étaient utilisés bons nombres d’ersatz comme du  quartz blanc, des éclats de cristal de roche appelés aussi « cailloux du Rhin » ou  une autre sorte de strass naturel appelé « diamant d'Alençon ». Il y avait aux environs d'Alençon des carrières de granit où l’on trouvait du quartz bien cristallisé, qui, une fois taillé, imitait joliment le diamant. 
 
Le terme « strass » est apparu en 1746. C’est dérivé du nom d'un joaillier strasbourgeois, Georges Frédéric Strass, qui mit à la mode un verre au plomb (tout comme le cristal) imitant les pierres ornementales.
Mis sur un paillon, c'est-à-dire une fine feuille de métal placée sous une pierre pour en augmenter l'éclat, les strass ont connus un grand succès.
Les croix de Rouen sont donc rehaussées de strass, inclus dans de petits cônes sertis sur le bijou.
 
Vous l’aurez certainement deviné, ces bijoux sont d’une grande fragilité.
Afin de renforcer la structure des cônes qui étaient creux, l’orfèvre les remplissait de mastique, de gomme, de terre ou de toute autre matière leur assurant rigidité au moment de leur fixation sur le bijou.
Le cône n’était pas directement soudé sur le bijou mais maintenu au moyen d’un téton serti au dos du bijou ou bien fixé par des pattes écrasées.
 
La plupart de ces croix étaient fabriquées en or bas titre. Il existe cependant quelques les exemplaires en or 18 carats parvenus jusqu'à nous. 
Et voilà comment expliquer pourquoi ces bijoux sont plutôt rares.
En France, pour les métaux précieux que sont l'or, l'argent, l'alliage d'or et le vermeil, le titre des ouvrages est contrôlé et garanti par l'état ou par des organismes agréés par lui. Cette garantie est attestée par l'apposition d'un poinçon sur chacun des bijoux après contrôle du service de la Garantie qui dépend du Ministère de l'Economie et des Finances.
De nombreuses croix, ne portant pas le poinçon de l’or ou n’ayant pas assez d’or dans le métal qui les composait ont été détruites par ces services.       
 
Une croix de Rouen mesure de 6 à 10 cm de hauteur, sans leur coulant, qui lui, mesure de 2 à 5 cm.
 
Les croix de Rouen ne sont pas les seuls bijoux normands remarquables.
Intéressez-vous au sujet, vous ferez de belles découvertes !
 
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ELLES ILLUSTRENT UNIQUEMENT L'ARTICLE.
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