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Sophie Sesmat,
spécialiste en arts
et traditions populaires
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Tirelire

Jeux et jouets
Tirelire allemande du XVIIème siècle, photo Tajan
L'histoire de la tirelire est étroitement liée à celle de l'épargne.
 
Voici un rapide aperçu de l'histoire de l'argent et des petits bas de laine!
 
La monnaie métallique apparaît au VIIème siècle avant Jésus-Christ et nous la devons aux Grecs.
De ce fait, les historiens attribuent logiquement la première tirelire à ce même peuple.
A l’époque, les piécettes étaient glissées dans un « thesaurus » en terre cuite, représentant souvent un temple. Les archéologues trouveront aussi de nombreuses tirelires en forme de buste, cette forme spécifique étant symbole de fécondité et donc d’une certaine manière d’abondance et de prospérité.
Plus tard, les épargnants romains enfermeront leurs économies dans des cassettes, des coffres, des bourses ou des tirelires à casser produites à peu de frais par des potiers.
Lors de fouilles, ont aussi été trouvées de belles tirelires en terre vernissées, très souvent piriformes.
 
Les tirelires qui nous restent du Moyen-Age et de la Renaissance sont peu nombreuses car beaucoup ont été faites en terre vernissée ou en terre cuite, matériaux tous deux assez fragiles. Très étonnamment, c’est dans les latrines qu'ont été trouvées le plus grand nombre de tirelires cassées. Les restaurateurs ont heureusement pu remettre en forme les objets ainsi brisés. Il y avait-il une coutume de jeter sa tirelire cassée aux toilettes? Cela portait-il particulièrement chance ? Voilà un mystère historique à élucider !
A cette même époque, il existe un autre type de tirelires, souvent métalliques et équipées de systèmes de fermeture complexes, avec verrous, cadenas, combinaisons secrètes et grosses pentures qui sécurisent le contenu. Lesdites cassettes pouvaient aussi être en cuir ou plus fréquemment en bois. Voilà de vrais petits coffres-forts !
 
Le XVIIème siècle voit naître les premières tirelires en faïence, provenant notamment de Delft et se voulant imiter les porcelaines d'Extrême-Orient. Ces contenants sont alors sphériques et ornés de décors bleus.
Dans le reste de l’Europe, à cette même période, la porcelaine est découverte. Les tirelires fabriquées dans ce matériau tout nouveau, donc recherché, étaient réservées pour des élites fortunées, ayant les moyens de s’offrir des pièces raffinées.
Les tirelires deviennent de très jolis objets d’art et de manière plus général, les matériaux avec lesquels elles sont réalisées s'ennoblissent : les tirelires sont alors en ivoire, en argent, en or, bronze doré, en marqueterie de bois, de paille, .... 
Les bois employés sont précieux comme l’ébène, le bois de rose, le palissandre,... 
Le fer forgé est repoussé, laqué et rehaussé de métal doré ou doré aux fers. A ceci s'ajoute des micro-mosaïques, des petites miniatures, des incrustations, … Bref, tous les délires et les désirs créatifs sont permis pour que l’objet, clairement ludique pour cette catégorie sociale aisée et peu dans le besoin, soit le plus élégant possible.
 
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Dès le XVIIIème siècle et dans les sociétés rurales traditionnelles, les tirelires sont en terre cuite émaillée ou peinte. Leurs formes sont d’abord assez primitives, possédant les mêmes caractéristiques que les tirelires romaines : sphériques ou piriformes, avec un petit bouchon sommital.
Elles évolueront pour devenir plus sophistiquées. Les potiers vont alors représenter des sujets qu’ils côtoient au quotidien, comme des chiens, des chats, des lapins, des oies, des canards, des pigeons et le fameux cochon, animal était considéré comme « une tirelire sur pattes » car éminent signe de richesse. Autre signe de prospérité chez les paysans : la poule pondeuse, souvent représentée sur un nid, couvant ses œufs.
 
La bourgeoisie accède à la tirelire seulement à partir de 1840, grâce à la révolution industrielle. Celle-ci permet une large démocratisation de nombreux objets, dont la tirelire qui devient un produit de consommation courante. Elles s’achètent dès lors dans les grands magasins et sont réalisées en grande série.
 
Désormais, la tirelire, qui est entrée dans tous les foyers de France, est considérée comme un jouet éducatif destiné à inculquer le sens de l'économie et de l'épargne aux enfants.
En effet, pour atteindre le butin patiemment accumulé, il fallait casser la tirelire et donc avoir un motif valable ou à défaut avoir bien réfléchi à l’usage qui allait être fait de l’épargne mise de côté.
Aujourd’hui, par soucis de réemploi de l’objet, nos industriels ont ajouté un petit opercule en plastique sous la tirelire, pour pouvoir récupérer l’argent et réutiliser la tirelire.
 
Le XIXème siècle est l'âge d'or de la tirelire. Les plus belles tirelires sont produites à cette période. Elles sont souvent en barbotine. Beaucoup d'autres matériaux moins nobles sont aussi employés à cette époque, comme le plâtre peint, le carton, le métal, la fonte émaillée, le bois et le plastique, qui rendirent les tirelires peu chères, servant ainsi de lots dans les foires.
Les formes se diversifient : des maisons, des meubles, des objets de la vie quotidienne, des bourses, des porte-monnaie, des troncs, des barils ou des coffres mais aussi des personnages célèbres et de nombreux animaux exotiques. Les tirelires sont toujours principalement en céramique et doivent toujours être cassées.
La figure de l’ours se développe car il est symbole de prévoyance, accumulant de la graisse pour l'hiver. L'éléphant, quant à lui, apporte puissance et richesse à son propriétaire.
A cette même époque, en Amérique du nord, les tirelires en fonte et à mécanisme sont très à la mode. Ce sont les premières à posséder un bouchon qui permet de retirer l’argent économisé : ça serait bien trop dangereux de tenter de casser une tirelire en fonte… Elles furent tellement recherchées, qu’aujourd’hui, sur le marché, il existe plus de fausses tirelires en fonte que de vraies !
 
Au début du XXème siècle, les tirelires, objets désormais ludiques et très variés, deviennent des articles d'exportation, que l’on achète ou que l’on offre volontiers. C’étaient par ailleurs d’excellents souvenirs de voyage.
Véritables révélateurs des mœurs de l’époque par leurs décors, elles mettent en avant les évolutions techniques (paquebot, voiture, poste de TSF, télévision,  …), les régionalismes exacerbés avec de jolies bretonnes, des alsaciennes, des cornemuses, des têtes de marin, ... les sports en vogue (cyclistes, les J.O, par exemple), les personnages célèbres de l’époque, … Ces objets, souvent monochromes, étaient fabriqués en grandes séries, restant ainsi abordables, mais de facture peu soignée. Il existe des séries de sujets identiques, dont seules les couleurs, monochromes ou polychromes, varient.
Les tirelires deviennent des supports de choix pour la publicité. L’arrivée des dessins animés et des bandes dessinées, dans les années 30 permet à de nombreuses manufactures telles qu’Onnaing et Desvres de s'inspirer de Walt Disney. L’humour est aussi au rendez-vous, avec des caricatures, entre autre.
Les faïenceries font preuve de beaucoup d'originalité pour diversifier leur production et proposer de nouvelles formes comme des chaussures, des fruits et des légumes.
 
La fabrication des tirelires s'essouffle peu après la Première Guerre Mondiale et s'éteint presque totalement dès les années 1950. La céramique n'est presque plus utilisée. L'avènement des grandes séries industrielles plongent ces objets dans l'univers du périssable. Les motifs s'appauvrissent et les formes très simples sont créées en plastique ou en fer blanc.
Aujourd’hui, le modèle le plus courant est bien évidement celui du petit cochon.
 
Ceci nous amène simplement à parler de ce type de tirelire, vraiment à part.
Le cochon-tirelire fut autrefois très utilisé par les enfants dans les pays de culture anglo-saxonne, avant de se diffuser partout en Europe et dans le monde.
Cette forme de tirelire est « historique », car c’est le modèle le plus ancien existant, à priori.
 
Elle semble avoir deux histoires distinctes qui se rejoignent :
 
-En Chine, en raison de sa rondeur, le cochon est le symbole de l’opulence. Avec une tirelire en forme de cochon, on ne peut qu’amasser naturellement des richesses. C'est d’ailleurs l’une des caractéristiques que l'on donne au signe du porc dans l'astrologie chinoise. L’objet est appelé « puman » littéralement : « frapper-plein », d’où le fait d’avoir à la casser pour récupérer le précieux contenu.
On sait également que les tirelires en forme de cochon existaient sous la dynastie Song (960 – 1279).
 
-En Grande-Bretagne, son nom est dérivé du moyen anglais « pygg » qui signifie « argile », matière dans laquelle est faite cette tirelire. Cette argile était utilisée dans la production de plusieurs objets, dont des bocaux et vases. Autrefois, les paysans gardaient leur argent dans des récipients de cuisine faits de ce genre d'argile. Ces fameux récipients seront par la suite appelés « pygg jars ». Au XVIIIème siècle, l'orthographe de « pygg » change ainsi que l’objet qui y est associé, devenant alors « pig bank », popularisé en « piggy banks » car surtout utilisés par les enfants. La figure du cochon est sympathique pour tout le monde.
Une fois le nom associé à la forme et non à la matière dans laquelle elle est faite, ont été fabriquées les « piggy banks » de verre, de plâtre, de plastique, en fonte de fer, d’aluminium, …
 
Selon une autre théorie, le nom « piggy bank » viendrait peut-être du monde agricole.
L'argent donné au « piggy bank » représenterait symboliquement les vivres donnés par l'éleveur au cochon : il dépense forcément de l'argent pour engraisser sa bête, argent qu'il ne se verra remboursé qu'une fois le cochon tué pour sa viande (représenté à nouveau symboliquement par le moment où l'enfant casse le « piggy bank »).
 
En France, dans la région PACA, une tradition ancestrale plutôt répandue, consistait à utiliser l'appétit naturel des cochons afin de leur faire ingurgiter de petits sacs d'or. Les paysans avaient pour habitude de cacher leurs économies de cette manière afin de se protéger des impôts. Les propriétaires ouvraient ensuite leur porc pour récupérer l'argent. J’ai essayé de vérifier cette tradition, mais je n’ai rien trouvé qui confirme ces écrits, alors, c’est à prendre avec des pincettes…
Voilà la belle histoire de la tirelire !
Heureusement, il reste aujourd’hui de très nombreuses tirelires anciennes qui ont survécu, pour le plus grand plaisir des collectionneurs. La large gamme de prix, souvent relativement abordables, permet à tous les mordus de se faire plaisir et de compléter facilement leur collection.
 
LES TIRELIRES EN PHOTO CI-APRES NE SONT PAS EN VENTE.
ELLESS ILLUSTRENT UNIQUEMENT L'ARTICLE.
CEPENDANT, IL PEUT IL Y EN AVOIR DANS LA BOUTIQUE DU SITE EN CE MOMENT, DECOUVREZ-LES EN CLIQUANT ICI :
 

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